par Laetitia GETTLIFFE, CEO & Fondatrice de Skill Connection
Le premier lundi de septembre, je suis arrivée au bureau un peu plus tôt que d’habitude. Le soleil peinait encore à toucher la table de réunion, et mon ordinateur affichait une notification qui m’a fait sourire et grimacer à la fois : “Téléchargements (27)”. Je me suis revue, des années plus tôt, pousser la porte d’une salle d’archives où les dossiers papier formaient des murailles. À l’époque, on disait : “Il faudra faire du ménage, ça déborde.” Aujourd’hui, ça ne déborde plus à vue d’œil. Ça pèse, en silence — sur nos serveurs, nos agendas, nos têtes.
J’ai préparé du thé à la menthe pour l’équipe et j’ai ouvert la réunion de rentrée sans slides, juste avec une image : un pot de terre et quelques graines sur la table.
— “Cette année, on arrête les grandes résolutions. On plante des graines.”
Les regards se sont levés. Certains amusés, d’autres prudents. Je connais ce mélange de curiosité et de scepticisme ; je le porte parfois moi-même.
Je n’ai pas parlé d’empreinte carbone tout de suite, ni d’objectifs chiffrés. J’ai parlé d’honnêteté. De ces habitudes qui s’installent sans bruit : un déplacement pris par réflexe, une réunion programmée “comme d’habitude”, un dossier qu’on garde “au cas où”. Et j’ai ajouté : “Je ne vous demanderai pas de devenir exemplaires. Je vous propose d’être responsables et conscients. Ça suffit largement pour changer la trajectoire.”
Alors on a commencé par le réel.
Lili-Rose a raconté ses vendredis après-midi passés à trier des fichiers jamais rouverts. Sandra a expliqué qu’elle coupe l’alimentation des écrans le soir en partant, et qu’au bout d’un moment, tout le monde s’y est mis sans débat. Moi, j’ai avoué ce moment de gêne, la veille, quand j’ai retrouvé trois versions d’une même vidéo dans un dossier “final_v3_def”. On a ri. La gêne s’est transformée en énergie.
À 9 h 30, on a fait notre premier choix de l’année : un rituel “10 minutes de tri”, deux fois par semaine. Pas un défi, pas un label. Un geste.
Puis un deuxième : la boussole de mobilité. Visio par défaut. Train quand c’est possible. Avion en dernier recours — et si on y recourt, on explique le pourquoi, avec honnêteté. Ce n’est pas héroïque. C’est tenable.
Et un troisième : la boucle énergie. Le dernier qui part ferme la lumière, coupe les écrans, jette un œil aux prises. On a imprimé une petite check-list qu’on a scotchée près de la porte. (Oui, le papier sert parfois à économiser beaucoup plus que lui-même.)
C’est à ce moment-là que Lili-Rose a posé la question que j’attendais :
— “Laetitia, à quoi bon si les autres ne le font pas ?”
J’ai laissé un silence. On connaissait tous la réponse simple : “Parce que ça compte quand même.” Mais je voulais mieux.
— “Parce que l’action modeste est une promesse tenue. Et parce que, souvent, quelqu’un doit commencer pour donner aux autres la permission d’essayer.”
On a noté au tableau : Responsabilité & Conscience. Deux mots, pas pour se juger, mais pour s’éclairer.
Dans l’après-midi, j’ai reçu un message d’un client : réunion à Lyon, en présentiel “si possible”. J’ai relu notre boussole. J’ai proposé un train et un horaire légèrement décalé. Il a accepté. Rien d’extraordinaire. Mais j’ai senti la graine prendre — cette sensation de cohérence entre ce qu’on dit et ce qu’on fait.
Les jours suivants, de petites choses se sont mises en place. Une réunion “zéro impression” testée sans drame. Un canal “Tri du jeudi” sur Teams, où chacun partage une capture “avant/après” d’un dossier allégé. Un trajet regroupé pour éviter l’aller-retour inutile. Ce n’est pas spectaculaire. C’est vivant.
En écrivant ces lignes, je pense à vous qui lisez. Sur LinkedIn, je rencontre trois familles de lecteurs :
- Les convaincu·es qui cherchent des mots simples pour embarquer leurs équipes. Prenez ce récit : faites-en le vôtre, racontez vos graines, vos ratés, vos réussites.
- Les hésitant·es, chez qui résonne le vieux “Why Bother ?”. Je vous vois. Commencez par une graine minuscule et regardez ce qu’elle change vraiment. L’élan vient après le geste.
- Les décideurs, qui ont besoin d’un discours non clivant. Parlez de cadres doux, de petites preuves, de trajectoires. Les équipes suivent les caps qui respectent le réel.
Je n’ai pas la prétention d’être irréprochable. Il m’arrive de prendre l’avion. Il m’arrive de tout garder “au cas où”. Mais je peux promettre une chose : nous publierons nos propres chiffres cette année. Pas pour afficher une médaille ; pour continuer ce dialogue d’honnêteté. Parce que la conscience, sans mesure, s’évanouit. Et la responsabilité, sans partage, s’essouffle.
Si je devais résumer notre rentrée, je dirais : un jardin commence toujours par une graine. Chez Skill Connection, notre métier, c’est d’aider ces graines à devenir des rituels, puis une culture. On outille le passage à l’action : une check-list près d’une porte, un gabarit de réunion sans impression, une boussole de mobilité à coller dans l’agenda, un rituel de tri numérique qui dure — vraiment — dix minutes.
Avant de refermer, je vous propose un pacte simple, à vous qui êtes peut-être déjà convaincu·e, ou encore hésitant·e, ou en position de décider pour d’autres : choisissez votre graine de la semaine. Une seule.
Remplacez un déplacement par une visio. Éteignez ce qui peut l’être en partant. Passez une réunion en zéro impression. Triez dix fichiers. Rien de plus. Faites-le deux fois. Regardez ce que ça change. Racontez-le.
Ce n’est pas une injonction. C’est une invitation. À commencer petit. À constater. À partager. Et, surtout, à cultiver ensemble.
Quelle graine plantez-vous cette semaine ?
Je lirai vos réponses. Et si vous le souhaitez, je vous enverrai en commentaire un micro-outil adapté à votre choix (check-list énergie, trame “réunion sans impression”, mini-rituel de tri, boussole mobilité).
Laetitia GETTLIFFE
CEO & Fondatrice de Skill Connection